Pratique | Conseils
Nourrir les oiseaux sauvages dans sa main : conseils et limites
Introduction
En hiver, il est amusant et instructif d’observer les passereaux se nourrissant sur les mangeoires installées dans un jardin, mais l’expérience est encore plus belle quand ils viennent manger dans la main. Jocelyn Anderson est une photographe américaine (site web : Jocelyn Anderson Photography) qui publie régulièrement de belles vidéos au ralenti de mésanges, de sittelles, de pics ou de tourterelles se posant sur sa main pour y chercher des graines de tournesol et d’arachides dans le Kensington Metropark à Milford, dans le Michigan (États-Unis).
Si l’on peut estimer qu’il est préférable de limiter au maximum les contacts avec les oiseaux sauvages (et nous n’avons pas pour but de promouvoir cette pratique), ces scènes filmées sont d’une grande beauté et elles nous donnent l’occasion d’observer certains comportements, par exemple les relations hiérarchiques qui existent entre les différentes espèces en hiver.
Dans cet article, nous vous donnons quelques astuces pour établir progressivement une relation de confiance avec les oiseaux afin qu’ils viennent chercher des aliments placés dans votre paume, tout en rappelant des limites à respecter. Nous remercions Jocelyn Anderson pour ses photos et ses vidéos.
Abstract
In winter, it is funny and interesting to watch birds feeding in your garden, but the experience is even more fantastic when they come to eat in your hand. Jocelyn Anderson is an American photographer (website: Jocelyn Anderson Photography) who regularly publishes beautiful slow-motion videos of chickadees, nuthatches, woodpeckers and doves that land on her hand to take sunflower seeds and shelled peanuts in the Kensington Metropark in Milford, Michigan (United States). If one can think that it is preferable to limit contact with wild birds as much as possible, these scenes are of great beauty and they give us the opportunity to watch certain behaviors, for example the hierarchical relationships that exist between the different species in winter.
In this article, we give you some tips for gradually building a relationship of trust with birds so that they come to look for food placed on your palm, while recalling some limits to respect. We thank Jocelyn Anderson for his photos and videos.
Certains oiseaux sont capables de reconnaître les personnes amicales
Pour qu’un jour des oiseaux sauvages acceptent de manger dans votre main, il faut qu’ils n’aient pas peur de vous et qu’ils vous associent à la distribution de friandises. Plusieurs expériences menées avec des masques ou des habits différents ont en effet montré que certains oiseaux comme le Moineau domestique (Passer domesticus), le Pigeon biset (Columba livia), la Pie bavarde (Pica pica) et d’autres corvidés (lire Les Pies bavardes peuvent distinguer les humains entre eux) étaient capables de distinguer les humains hostiles et amicaux en fonction de leur attitude passée.
Quelques conseils pour gagner la confiance des oiseaux
Tout d’abord, il faut que dans le lieu choisi, les oiseaux soient habitués à venir manger sur les mangeoires mises à leur disposition, ou bien que d’autres personnes les nourrissent régulièrement manuellement, comme c’est le cas dans le Kensington Metropark à Milford dans le Michigan, où Jocelyn Anderson filme régulièrement avec son smartphone (un iPhone) des vidéos au ralenti (pour plus de stabilité, mais aussi pour des raisons esthétiques), des mésanges, des sittelles, des pics ou des tourterelles venant chercher des graines placées dans sa paume (voir plus bas).
Distribuez régulièrement de la nourriture, si possible à la même heure, pour qu’ils associent votre présence à un bon repas.
Pour les habituer progressivement à votre présence physique, vous pouvez placer durant un certain temps près de votre mangeoire un mannequin (ou une structure évoquant une forme humaine) habillé avec vos vêtements, et un jour, mettez-vous à la place de ce mannequin.
Une méthode plus classique consiste à se rapprocher très progressivement de la mangeoire, un peu plus près chaque jour (placez-vous à au moins cinq mètres au départ), et de rester longuement debout ou assis (habillez-vous chaudement). Il faut être patient et persévérant, cela peut prendre des semaines (généralement au moins deux) avant qu’un oiseau ne se pose sur votre main. Toutefois, en cas de conditions hivernales rudes, des passereaux affamés hésiteront moins.
Ne faites pas de gestes brusques et n’essayez pas de suivre les oiseaux. Ne vous inquiétez pas si vous avez fait involontairement un geste ou un bruit brusque, placez-vous simplement un peu plus loin de la mangeoire le jour suivant.
Portez des lunettes car elles cacheront les mouvements de vos yeux, qui peuvent effrayer les oiseaux.
Ne mettez pas de parfum.
Une fois que vous pensez que vos amis ailés sont assez en confiance, vous pouvez essayer de tendre votre main avec de la nourriture placée dans votre paume. Vous pouvez leur « parler » doucement en même temps.
Un jour où les oiseaux seront particulièrement nombreux, retirez la nourriture de votre mangeoire et placez-la dans votre main, afin que celle-ci devienne la seule source d’aliments disponibles. Replacez de la nourriture dans la mangeoire une fois que vous aurez terminé votre séance de nourrissage manuel.
Généralement, quand un premier oiseau aura commencé à venir dans votre main, d’autres suivront.
Vidéo au ralenti réalisée avec un iPhone montrant une Mésange bicolore (Baeolophus bicolor), puis une Mésange à tête noire (Poecile atricapillus), venant chercher des graines de tournesol et d’arachide dans la main de Jocelyn Anderson dans le Kensington Metropark à Milford dans le Michigan (États-Unis). |
Quelques espèces que l’on peut « facilement » nourrir dans sa main
Les mésanges seront certainement les premiers oiseaux à venir récupérer de la nourriture dans votre main. Dans le Kensington Park (Michigan), Jocelyn Anderson a réussi notamment à nourrir dans sa main les Mésanges à tête noire (Poecile atricapillus) et bicolore (Baeolophus bicolor), la Sittelle à poitrine blanche (Sitta carolinensis), le Cardinal rouge (Cardinalis cardinalis), les Pics mineur (Dryobates pubescens) et à ventre roux (Melanerpes carolinus), le Carouge à épaulettes (Agelaius phoeniceus), la Tourterelle triste (Zenaida macroura) et le Geai bleu (Cyanocitta cristata).
En Europe, les Mésanges charbonnière (Parus major) et bleue (Cyanistes caeruleus), la Sittelle torchepot (Sitta europaea), le Rougegorge familier (Erithacus rubecula) et le Moineau domestique peuvent assez facilement être attirés.
Signalons par ailleurs qu’il existe de petits distributeurs d’eau sucrée portables et colorés incitant les colibris à venir boire dans votre main (lire Attirer et nourrir les colibris et les souimangas dans les jardin).
Vidéo montrant des Mésanges charbonnières (Parus major) se succédant pour venir chercher des graines dans la main en Grande-Bretagne le 14 janvier 2013. |
Distribuer une nourriture appropriée
Pic à ventre roux (Melanerpes carolinus) venant chercher des graines de tournesol et d’arachide dans la main de Jocelyn Anderson. Le gant permet de se protéger du froid, des griffes et du bec de l’oiseau, et il limite aussi les contacts avec la peau (cliquez sur la photo pour l’agrandir). |
La nourriture que vous proposez déterminera dans une certaine mesure les espèces que vous voudrez attirer (lire Quelles graines pour quels oiseaux ?). Jocelyn Anderson utilise par exemple un mélange composé de graines d’arachide et de tournesol, décortiquées ou non, avec parfois des fruits secs (noix, pistaches…).
Des limites à respecter
Il vaut mieux limiter le nourrissage manuel aux espèces d’oiseaux qui visitent régulièrement les mangeoires dans les jardins.
Il est généralement conseillé de limiter les contacts avec les oiseaux sauvages, donc cette pratique a des aspects critiquables. Afin de ne pas modifier leur comportement, limitez la fréquence de ces séances et ne les pratiquez qu’en hiver, quand il gèle et/ou qu’il neige et qu’un supplément alimentaire les aidera vraiment.
Il est aussi préférable de porter des gants de couleur neutre pour éviter tout risque de contamination éventuelle, mais aussi pour vous protéger de leurs griffes et de leur bec. Le risque sanitaire est généralement limité, sauf si vous avez déjà noté dans votre secteur des oiseaux morts ou semblant malades.
Observer la hiérarchie entre les espèces
En hiver, les passereaux forment des « rondes » composées d’une ou de plusieurs espèces pour trouver plus efficacement de la nourriture dans les bois et les jardins (lire Les rondes d’oiseaux), et il existe une hiérarchie intra et interspécifique. Par exemple, chez les Mésanges charbonnière et nonnette (Poecile palustris), les mâles dominent les femelles, et les adultes ont un rang supérieur à celui des jeunes. La Mésange nonnette évite les lieux où se nourrit la Mésange huppée (Lophophanes cristatus), et cette dernière mange après la Mésange charbonnière.
En Amérique du Nord, les Mésanges à tête noire et bicolore, qui « dirigent » généralement les troupes mixtes en hiver, ont un rang supérieur aux pics, sittelles, roitelets, grimpereaux et parulines qui les suivent et qui peuvent alors être qualifiés d’espèces subordonnées.
Ces relations entre oiseaux dominants/dominés sont visibles dans les vidéos filmées par Jocelyn Anderson (voir ci-dessous).
Vidéo au ralenti réalisée avec un iPhone montrant un Pic mineur (Dryobates pubescens) venant chercher des graines de tournesol et d’arachide dans la main de Jocelyn Anderson dans le Kensington Metropark à Milford dans le Michigan (États-Unis) : il se met en retrait quand arrive une Mésange à tête noire (Poecile atricapillus), une espèce dominante en hiver. |
Un livre de référence
Hugh Wiberg nourrit les oiseaux dans sa main en hiver depuis plus de vingt ans dans son jardin et dans les forêts environnantes. Dans son ouvrage intitulé Nourrir les oiseaux dans sa main (il est moins cher dans sa version anglaise originale : Hand-Feeding Backyard Birds: A Step-By-Step Guide), il décrit ses patients efforts et donne des conseils pratiques pour obtenir étape par étape les mêmes résultats que lui à l’aide de 80 photos. Il donne la liste des oiseaux les plus faciles à attirer, ainsi que de précieuses indications sur les lieux, les heures et les températures les plus propices. Parmi les commentaires des lecteurs, l’un d’entre eux précise qu’il a pu attirer des mésanges dans sa main en deux semaines et demie grâce à ce livre.
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Compléments
Produits recommandés
- Nourrir les oiseaux dans sa main d’Hugh Wiberg
- Hand-Feeding Backyard Birds: A Step-By-Step Guide (2010) d’Hugh Wiberg
- Hand-Feeding Backyard Birds: A Step-By-Step Guide (1993) d’Hugh Wiberg
À lire sur le web
Le site web de Jocelyn Anderson : jocelynandersonphotographyshop.com – Page Twitter : twitter.com/JocAPhotography
Dans la boutique d’Ornithomedia
Sources
- Jocelyn Anderson (2019). How to hand feed birds. Avril. jocelynandersonphotographyshop.com/pages/how-to-hand-feed-birds
- melissa J. Will (2019). 10 tips for and feeding wild birds. Date : 29/12. empressofdirt.net/hand-feed-wild-birds/
- Ernő Vincze, Sándor Papp, Bálint Preiszner, Gábor Seress, András Liker et Veronika Bókony (2015). Does urbanization facilitate individual recognition of humans by house sparrows? Animal Cognition. Volume : 18. Numéro : 1. Pages : 291–298. Janvier. link.springer.com/article/10.1007/s10071-014-0799-z
- Ahmed Belguermi, Dalila Bovet, Anouck Pascal, Anne-Caroline Prévot-Julliard, Michel Saint Jalme, Lauriane Rat-Fischer et Gérard Leboucher (2011). Pigeons discriminate between human feeders. Animal Cognition. Volume : 14. Page : 909. Novembre. link.springer.com/article/10.1007/s10071-011-0420-7
- Diane Porter (2004). Hand feeding wild birds. Birdwatching. www.birdwatching.com/stories/handfeeding.html
- Maria Sandell et Henrik G. Smith (1991). Behavioral Ecology and Sociobiology. Volume : 29. Numéro : 2. Pages : 47–152. link.springer.com/article/10.1007/BF00166490
- Kari Koivula et Markku Orell (1988). Social rank and winter survival in the Willow Tit Parus montanus. Ornis Fennica. Volume : 65. Pages : 114-120. lintulehti.birdlife.fi:8443/pdf/artikkelit/629/tiedosto/of_65_114-120_artikkelit_629.pdf
- Rauno V. Alatalo (1981). Interspecific Competition in Tits Parus spp. and the Goldcrest Regulus regulus: Foraging Shifts in Multispecific Flocks. Oikos. Volume : 37. Numéro : 3. Pages : 335-344. Décembre. www.jstor.org/stable/3544125?seq=1
2 commentaire(s) sur ce sujet
Participer à la discussion !kin_dzadza
Paris
Posté le 14 janvier 2024
Cela me rappelle les ballades dans les parcs de Moscou.
En tendant une main remplie de graines de tournesol, j’avais presque immédiatement une poignée de mésanges charbonnières et un pinson qui venaient s’y poser, Tout cela en une minute chrono et en retirant la main épisodiquement pour éviter les pigeons.
Je n’ai jamais vu cela ailleurs, été comme hiver.
Voici la vidéo de l’époque : https://rutube.ru/video/c0e6d05f2f2e14ab4ba421d830180dac/
Ornithomedia
sevran
Posté le 15 janvier 2024
Bonjour, merci beaucoup !