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Quelques conseils simples pour partager les plages avec les oiseaux
Introduction
Les activités de plein air (randonnées, promenades, bains de soleil, sports nautiques, sports motorisés, VTT…) sont de plus en plus populaires et le nombre d’adeptes augmente fortement au printemps et en été. Certaines plages le long des côtes, des rivières et des plans d’eau sont particulièrement appréciées. Or, à la belle saison, ce sont aussi des sites de nidification pour plusieurs espèces d’oiseaux nichant au sol et qui sont très sensibles aux dérangements comme les limicoles (gravelots, huîtriers, oedicnèmes, etc.), les sternes ou des passereaux (pipits, alouettes, etc.). Or une perturbation des parents durant la période de nidification peut entraîner un abandon du nid, un refroidissement des œufs ou augmenter les risques de prédation. Ces nids peuvent également être détruits par piétinement ou le passage d’engins. Le reste de l’année, ces zones côtières constituent aussi des zones d’alimentation et de repos pour les oiseaux.
Le 11 avril 2024, le Conservatoire du Littoral, l’Office français de la Biodiversité, l’Office National des Forêts, la Ligue pour la Protection des Oiseaux et Rivages de France, en partenariat avec de nombreuses associations et gestionnaires de sites, ont lancé sur le sillon de Talbert (Côtes-d’Armor) la cinquième opération « Attention, on marche sur des œufs ! » visant à sensibiliser les usagers du littoral français au respect de la faune sauvage qui partage ces espaces souvent touristiques et très fréquentés. Elle s’achèvera au mois d’août.
Dans cet article, nous recensons un certain nombre de conseils simples à suivre et à faire connaître (ou à rappeler) autour de vous.
Abstract
Outdoor activities (hiking, walking, sunbathing, water sports, motor sports, mountain biking …) are increasingly popular and the number of users increases dramatically in spring and summer. Beaches along coasts, rivers and lakes are especially appreciated. But they are also breeding sites for several gound-nesting birds that are very sensitive to disturbance such as shorebirds, terns and passerines (pipits, larks…). And disturbing parents during the nesting period can result in nest abandonment, cooling eggs or increasing the risk of predation. These nests can also be destroyed by trampling or by the passage of vehicles. The rest of the year, these coastal areas are also feeding and resting areas for birds.
On April 11, 2024, the Conservatoire du Littoral, the Office français de la Biodiversité, the Office National des Forêts, the Ligue pour la Protection des Oiseaux and Rivages de France, in partnership with numerous associations and site managers, launched on the sillon de Talbert, a natural formation situated in th Côtes-d’Armor department, the fifth operation « Attention, on marche sur des œufs ! (Be careful, we’re walking on eggshells!) » aiming to raise awareness among users of the French coasts about respecting the wildlife that shares these often touristy and busy areas. It will end in August.
In this article, we identify a number of simple tips to follow and promote around you to share the beaches with birds.
Les plages sont aussi des sites de nidification, de nourrissage et de repos pour les oiseaux
Poussin de Petit Gravelot (Charadrius dubius) sur une plage de galets le long du Doubs à Lays-sur-le-Doubs (Saône-et-Loire) le 11 août 2013. |
Certaines plages de sable et de galets (mais aussi les dunes et les vasières) le long des côtes, des lacs et des cours d’eau constituent des habitats de nidification, de nourrissage et de repos pour de nombreux oiseaux. En France, le Grand Gravelot (Charadrius hiaticula), le Petit Gravelot (Charadrius dubius), le Gravelot à collier interrompu (Charadrius alexandrinus), l’Oedicnème criard (Burhinus oedicnemus) (par exemple sur les bancs de sable de la Loire et de l’Allier, lire L’Allier entre Moulins-sur-Allier et le Bec d’Allier), l’Huîtrier pie (Haematopus ostralegus), les Sternes pierregarin (Sterna hirundo), naine (Sternula albifrons) (par exemple sur les bancs de sable de la Loire et de l’Allier) et caugek (Thalasseus sandvicensis) (par exemple sur le banc d’Arguin en Gironde, lire Observer les oiseaux dans la réserve naturelle nationale du Banc d’Arguin) l’Alouette calandrelle (Calandrella brachydactyla) et le Pipit rousseline (Anthus campestris) sont quelques-unes des espèces déposant leurs oeufs sur le sable.
Ces oiseaux ne construisent pas de nid, juste parfois une ébauche tapissée d’algues séchées. Les limicoles nichent plutôt en haut des plages, non loin de la base des dunes, et les passereaux souvent près d’un buisson ou d’une touffe de graminées.
Généralement migrateurs, ils ne commencent leur période de ponte qu’assez tardivement, en avril-mai. Pour nourrir leurs petits, ils sont obligés de s’éloigner de leur nid. Lorsque leur progéniture est menacée, les parents essaient de chasser l’intrus : les sternes survolent sa tête en criant, les huîtriers s’éloignent en poussant de puissants cris et les gravelots courent et simulent parfois une blessure (lire Le comportement des gravelots nicheurs vis à vis des dérangements). La page Facebook « Météo des oiseaux » donne des conseils pour apprendre à repérer les sternes nicheuses sur le littoral du Languedoc-Roussillon.
Tous ces oiseaux sont très sensibles aux dérangements (promeneurs, chiens, sportifs). À force de dépenser de l’énergie, ils peuvent finir par se lasser et partir. La répétition des dérangements peut empêcher la bonne incubation des oeufs. Une étude menée en Grande-Bretagne sur le Pluvier doré (Pluvialis apricaria) a montré que des interruptions répétées pendant la période d’élevage des jeunes réduiraient leur taux de croissance et leur probabilité de survie.
D’autre part, quand les adultes sont obligés de délaisser leur nid, les œufs ou les poussins deviennent des proies idéales pour les goélands et les corneilles, et les rapaces comme le Faucon pèlerin (Falco peregrinus) peuvent profiter d’une panique dans une colonie pour attraper les moins vigilants.
Jeune Petit Gravelot (Charadrius dubius) sur une île de la Loire à Ancenis (Loire-Atlantique) le 15 juin 2015. |
Du fait de leurs couleurs mimétiques les oeufs et les poussins de plusieurs espèces peuvent être aussi tout simplement piétinés par des promeneurs ou des véhicules.
L’urbanisation du littoral et la forte fréquentation touristique des plages à la belle saison limitent en outre de plus en plus les endroits favorables à la nidification de ces oiseaux.
Afin de garantir le succès de leur reproduction, entre le 1er avril et le 31 juillet, des zones interdites au public, signalées par des panneaux demandant aux promeneurs de rester sur les sentiers et de garder les chiens en laisse, sont parfois définies, et des sentiers sont tracés.
Des cages peuvent être posées sur les nids de gravelots afin de les protéger des prédateurs (oiseaux, chiens…). Ces mesures peuvent réduire les dérangements d’origine humaine (lire Comment concilier tourisme côtier et protection des gravelots ? Première partie), mais des règles plus restrictives d’interdiction totale sont parfois nécessaires.
D’autre part, les plages constituent des sites de nourrissage et de repos pour les limicoles, les laridés, les cormorans (mais aussi les pélicans et bien d’autres familles d’oiseaux à travers le monde) durant les migrations et en hiver.
Une liste de conseils pour partager les plages avec les oiseaux (et les autres animaux sauvages)
Soyez attentif et gardez vos distances
Il ne faut pas s’approcher des oiseaux nicheurs, mais aussi de ceux qui se nourrissent ou se reposent, car on risque de les déranger. Si vous voyez un oiseau criant, s’agitant nerveusement ou simulant une aile cassée, c’est que vous êtes sûrement trop près de son nid (lire Pourquoi certains oiseaux sont-ils parfois si confiants ?).
Si vous cherchez un endroit pour installer votre serviette et votre parasol, vérifiez bien qu’aucun oiseau ne niche à proximité.
Respectez les panneaux d’information
Si des panneaux indiquent qu’une zone accueille des oiseaux nicheurs durant une période donnée, il ne faut pas aller au-delà, même si vous ne les voyez pas.
Gardez votre chien en laisse
Une sterne perturbée aura un comportement inhabituel, volant et criant sur place : ce n’est heureusement pas le cas de cette Sterne pierregarin (Sterna hirundo) photographiée au Croisic (Loire-Atlantique) le 17 août 2015. |
S’il est sympathique de voir son chien se défouler en courant dans tous les sens, gardez-le en laisse durant la période de nidification des oiseaux, en particulier près des dunes, dans la partie supérieure de la plage et à proximité des zones protégées. Si vous décidez de le lâcher, surveillez-le bien pour ne pas qu’il coure derrière les oiseaux ou qu’il ne détruise une couvée. Si vous débarquez sur une île sablonneuse (si cela est autorisé), gardez-le aussi en laisse.
Pas de feux d’artifice ni de pétards
En France, les 13 et 14 juillet, les feux d’artifice (modèles autorisés à la vente) et les pétards résonnent un peu partout : il ne faut pas les déclencher sur les plages et dans les dunes, cela risque d’avoir un effet catastrophique sur les oiseaux nicheurs.
Si vous êtes à cheval
Les promenades à cheval sur les plages peuvent être autorisées, généralement hors saison touristique (juillet-août), tôt le matin et tard le soir et toujours à marée basse. Là aussi, évitez de circuler près des dunes, respectez les zones protégées et évitez de déranger les oiseaux se reposant et se nourrissant.
Si vous êtes en bateau
Les herbiers aquatiques proches des plages sont fragiles et servent de nurseries pour les poissons dont se nourrissent les sternes (entre autres), n’y mouillez pas vos ancres et choisissez le sable nu.
Ramassez vos déchets
Les déchets peuvent être mortels pour les oiseaux (étouffement, étranglement, toxicité), ils peuvent favoriser les prédateurs (goélands, corneilles, mammifères) (évitez aussi de les nourrir) et ils dégradent le paysage. Emportez-les avec vous ou déposez-les dans les poubelles les plus proches.
Si vous pratiquez la pêche à pied
À chaque poisson ou coquillage pêché correspond une taille minimale de capture afin de permettre leur reproduction : laissez les petits poissons et autres animaux marins devenir grands et permettez ainsi le maintien de la biodiversité.
Ne laissez pas derrière vous vos fils de pêche et vos hameçons
Si vous avez décidé de pêcher sur la plage, vérifiez bien avant de partir que vous n’avez pas laissé derrière vous des fils de pêche et des hameçons, qui peuvent être mortels pour les oiseaux.
Signalez les oiseaux blessés
Si vous trouvez un oiseau blessé (attention, un adulte peut simuler une aile brisée pour vous éloigner de son nid), contactez un centre de soins (lire Oiseau blessé ou oisillon tombé du nid : que faire ?).
Respectez la végétation
Les laisses de mer (ici en baie de Somme) doivent être conservées. |
La végétation dunaire fixe le sable et abrite une faune fragile. Les oiseaux peuvent y nicher et y chercher leur nourriture. Ne vous promenez pas dans les dunes en dehors des accès prévus.
Sensibilisez les autres et les mairies
Si vous voyez des personnes ayant un comportement non approprié, essayez de les sensibiliser en leur parlant (amicalement) de la nécessité de respecter la nature et les oiseaux : qui sait, cela pourra peut-être éveiller des consciences.
Si vous constatez que des oiseaux nichent sur une plage ou dans des dunes, parlez-en à la mairie de votre commune pour qu’éventuellement des mesures de protection soient prises.
De même, le nettoyage régulier des plages par des engins spécialisés ne laisse que très peu de chance aux nids et aux couvées. La mauvaise habitude qui consiste à supprimer les laisses de mer (accumulation par la mer de débris naturels à la limite supérieure du flot), au prétexte que ça fait « sale » prive les échassiers nicheurs et migrateurs des puces de mer dont ils se nourrissent : essayez de sensibiliser la mairie concernée à ce sujet.
L’opération « Attention, on marche sur des œufs !’
Panneau de sensibilisation sur le respect de la nidification du Grand Gravelot (Charadrius hiaticula) et du Gravelot à collier interompu (C. alexandrinus) sur la plage du phare de Walde (Pas-de-Calais). |
Pour sensibiliser les usagers au respect de la faune du littoral français, le Conservatoire du Littoral, l’Office Français de la Biodiversité, l’Office National des Forêts, la Ligue pour la Protection des Oiseaux et Rivages de France, en partenariat avec de nombreuses associations et gestionnaires de sites, appellent à la vigilance sur les plages et ont imaginé l’opération « Attention, on marche sur des œufs ! » qui s’étale jusqu’au mois d’août.
Dans le cadre de cette action, ces organismes se mobilisent à plusieurs niveaux :
- cartographie, suivi et action de protection des nids jusqu’à l’envol des poussins.
- Information et sensibilisation des usagers (promeneurs, sportifs, professionnels du tourisme, collectivités, etc.),
- Surveillance et police de l’environnement.
La cinquième édition a été lancée le 11 avril 2024 sur le site du sillon de Talbert, dans la commune de Pleubian, dans les Côtes-d’Armor (lire Observer les oiseaux du Sillon de Talbert).
Les mesures de protection (signalisation et enclos) mises en place depuis 2020 dans le cadre de cette opération continuent de montrer leur efficacité, avec un succès de reproduction de 86 % pour les nids protégés, contre 30 % pour les autres. Ainsi, en 2023, 33 poussins de Gravelots à collier interrompu sont nés dans le Parc Marin du bassin d’Arcachon (Gironde), contre 19 en 2022.
Les organisateurs rappellent les attitudes à adopter pour réduire son impact sur l’avifaune nicheuse et sauver des poussins :
- vérifier que l’accès au site du littoral où l’on souhaite se rendre est autorisé et que les activités que l’on compte mener sont permises.
- Rester sur les sentiers balisés.
- Tenir strictement son chien en laisse.
- Éviter de fréquenter le haut de plage, les dunes de sable ou les espaces végétalisés en arrière du littoral.
- Respecter la signalétique relative à l’environnement et à la circulation des personnes.
- Ne laisser aucun déchet derrière soi.
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Compléments
Ouvrages recommandés
- Au long des rivages : Côte Ouest : Atlantique, Manche et Mer du Nord (2012) de Catherine Vadon et Alain Foucault
- Les Oiseaux des côtes de France de Georges Dif
- Sauvage en Normandie de Perelle & Leroy
Sources
- OFB (2024). Opération 2024 « Attention, on marche sur des œufs ! ». www.ofb.gouv.fr
- Sun Times (2016). Audubon: Keep beaches, wildlife safe on holiday weekend. Date : 18/05. www.marcoislandflorida.com/story/life/2016/05/28/audubon-keep-beaches-wildlife-safe-holiday-weekend/85088004/
- Susan Ruddiman (2012). Audubon asks for help from Mississippi beachgoers to not disturb nesting birds. date : 25/05. GuilfLive. http://blog.gulflive.com
- Olivier Scher et Sandrine Lafont. Apprenons à respecter la tranquillité des oiseaux ! Villeneuve-lès-Maguelonewww.villeneuvelesmaguelone.fr
- Grand Site Dunaire Gâvres-Quiberon. Observations naturalistes : Gravelots à collier interrompu du 2/6/2010 Au 2/7/2010. www.site-gavres-quiberon.fr
- Parc naturel réhional de Camargue. Plages vivantes de Camargue. www.parc-camargue.fr
- Conservation Nature. Impact des activités récréatives sur les oiseaux d’eau. www.conservation-nature.fr/article2.php?id=86
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