La pointe de Bloscon, un site à l’histoire ancienne bien placé pour l’observation des oiseaux

Situation de la pointe de Bloscon (Finistère)

Situation de la pointe de Bloscon (Finistère).
Carte : Ornithomedia.com

La ville de Roscoff occupe une grande partie du promontoire rocheux qui ferme à l’ouest la baie de Morlaix et qui est composé de trois avancées dans la Manche : celle du milieu, la moins marquée, occupe le centre de la vieille ville et est appelée la pointe du Vil. Elle est séparée de celle de Perharidy, la plus occidentale, par l’anse de Laber, et de celle de Bloscon, la plus orientale, par la petite anse du vieux port.
La pointe de Bloscon était autrefois occupée par un château médiéval, sur lequel a été érigé un fort au XVIIe siècle, puis une maison de notable de style néogothique au début du XXe siècle.
Dominant la pointe, une chapelle dédiée à Sainte-Barbe a été construite en 1619.
Dans les années 1860, des viviers ont été créés sur la rive ouest afin de stocker et de conserver les crustacés pêchés avant leur vente.
Dans la seconde partie du XIXe siècle, une digue en forme d’arc de cercle, mesurant près de 170 mètres de long, a été érigée à l’est de la pointe. 
Lors de la Seconde Guerre mondiale, la pointe de Bloscon a été intégrée au Mur de l’Atlantique et des bunkers ont été construits par l’Armée allemande pour prendre en enfilade l’entrée du port de Roscoff.  
Dans les années 1970, un port en eau profonde, d’où partent les navires transmanche de la compagnie Brittany Ferries, a été creusé. Complété et modernisé en 2014 pour la pêche et la plaisance, il dispose aujourd’hui d’une criée et d’un bassin dédié à la plaisance.

Haie de tamaris

La haie de tamaris à l’est de la pointe de Bloscon constitue un bon site d’observation des oiseaux marins par fort vent. Au fond, la balise de Men Gwen Bras (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Laurent Thébault

Outre son riche passé historique, la pointe de Bloscon est intéressante pour l’observation des oiseaux marins. En effet, elle offre un large panorama sur l’est de l’île de Batz, sur le petit îlot rocheux de Ty Saozon, sur le nord de la baie de Morlaix (plateaux marins rocheux des Duons et de la Méloine) et plus à l’est, sur Trébeurden, la réserve naturelle nationale des Sept-Îles, le phare des Triagoz et le nord de la baie de Lannion.
Comme le phare de Brignogan, la pointe est idéalement située entre la mer d’Iroise et le Cotentin et permet d’observer les mouvements locaux et régionaux des oiseaux marins nicheurs et migrateurs.
Enfin, sa proximité avec la baie de Morlaix lui permet de fonctionner comme une « nasse » pour les oiseaux lors de forts vents de Nord-ouest et de Nord.
Il faut préciser que très peu d’oiseaux pélagiques pénètrent dans le chenal de l’île de Batz, entre cette dernière et le continent.  

Accès à la pointe de Bloscon et bons sites d’observation

Depuis Morlaix au sud-est, rejoindre Roscoff par la D58. La pointe de Bloscon est située à l’est de la ville et peut être rejointe par le boulevard Sainte-Barbe. Deux aires de stationnement sont disponibles (si vous venez en voiture).
Autrement, Roscoff est accessible par le train depuis la gare Montparnasse (Paris) en 4 h 30. 

Il y a deux bons points d’observation du passage des oiseaux marins :

Carte de la pointe de Bloscon (Finistère)

Carte de la pointe de Bloscon (Finistère) et bons points d’observation des oiseaux : (1) la chapelle Sainte-Barbe et (2) la haie de tamaris bordant l’aire de stationnement à l’est de la ponte.
Carte : Ornithomedia.com

  • la chapelle Sainte-Barbe, qui est facilement accessible et qui offre une vue dégagée grâce à sa position élevée.
  • La haie de tamaris qui borde la grande aire de stationnement à l’est de la pointe. Elle permet d’observer les oiseaux à l’abri du vent par gros temps d’ouest et d’accéder à une plateforme naturelle très bien protégée.

L’extrémité de la pointe de Bloscon, qui n’est accessible qu’à marée basse, est peu utilisée par les observateurs. En outre, le flux des oiseaux marins se concentre à l’est du tombant d’Astan, qui borde la partie orientale de l’île de Batz. La balise de Men Gwen Bras, située à l’entrée du chenal, constitue donc un repère utile pour l’observation.
Par ailleurs, nous vous conseillons de visiter le superbe jardin botanique de Roscoff, dont la collection de plantes compte plus de 3 500 espèces.

Observer la migration des oiseaux marins en été et en automne

La pointe de Bloscon est bien moins connue que le populaire sémaphore de Brignogan pour l’observation du passage des oiseaux marins, mais un regain d’intérêt pour ce site a débuté en 2000, avec les suivis d’Ewen de Kergariou et de Laurent Thébault, dont les données ont été saisies dans la base de données Trektellen et ont été utilisées dans l’Atlas des oiseaux migrateurs de France (publié 2022) et dans plusieurs publications sur les oiseaux marins, en particulier sur le Puffin des Baléares (Puffinus mauretanicus) (lire Identifier les Puffins des Anglais, yelkouan et des Baléares).
La fin de l’été et l’automne sont les meilleures périodes pour observer les oiseaux marins. La Mouette mélanocéphale (Ichthyaetus melanocephalus) se montre régulièrement à partir du mois de juillet.

Sterne caugek (Thalasseus sandvicensis)

Sterne caugek (Thalasseus sandvicensis) passant devant la pointe de Bloscon (Finistère) (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Laurent Thébault

En juillet et surtout en août, on note le passage des premières Sternes pierregarins (Sterna hirundo) (jusqu’à 772 le 8 août 2007), caugeks (Thalasseus sandvicensis) (jusqu’à 384 le 17 juillet 2009) et parfois de Dougall (S. dougalli) (jusqu’à 18 le 17 juillet 2009), suivies par les Sternes arctiques (Sterna paradisaea), les Labbes parasites (Stercorarius parasiticus) et les Labbes pomarins (S. pomarinus). 
Les mois de septembre et d’octobre sont les plus intéressants au niveau de la diversité spécifique, avec notamment le passage des Puffins des Anglais (Puffinus puffinus), des Baléares (rare avant le mois de juin et dont le pic du passage est atteint en août-septembre, avec jusqu’à 687 comptés le 5 octobre 2021), cendré (Calonectris borealis) (jusqu’à 615 comptés en 1 h 30 le 28 août 2023), fuligineux (Ardenna grisea) (jusqu’à 644 le 3 octobre 2008) et majeur (A. gravis) (un le 28 août 2023, une espèce plus rare que depuis le sémaphore de Brignogan). L’Océanite tempête (Hydrobates pelagicus) est régulier jusqu’en septembre.
Quatre espèces de labbes sont visibles ((jusqu’à 35 Labbes parasites le 26 septembre 2007 et 106 Grands Labbes le 3 octobre 2008), même si le Labbe à longue queue (Stercorarius longicaudus) est très rare (un le 3 octobre 2008).
La Mouette de Sabine (Xema sabini) est peu fréquente, alors que la Guifette noire (Chlidonias niger) (jusqu’à 17 le 16 septembre 2006), le Fou de Bassan (Morus bassanus), les sternes et les premiers Alcidés sont plus nombreux. Notons l’observation d’un Macareux moine (Fratercula arctica) le 14 septembre 2007.
À la fin du mois d’octobre, les Pingouins tordas (Alca torda) et les Guillemots de Troïl (Uria aalge) passent en grand nombre (parfois plusieurs milliers d’individus par jour), et on observe alors les premiers plongeons, des Macreuses noires (Melanitta nigra) (jusqu’à 63 le 18 novembre 2008) et des Harles huppés (Mergus serrator), et parfois un Eider à duvet (Somateria molissima) ou une Harelde boréale (Clangula hyemalis). 
Les oiseaux terrestres ne sont pas en reste, avec par exemple parfois plusieurs centaines de Pigeons ramiers (Columba palumbus) survolant la Manche, et des groupes de fringilles, d’alouettes, de pipits, d’hirondelles et d’Étourneaux sansonnets (Sturnus vulgaris) longeant la côte. Le Bruant ou Plectrophane des neiges ((Plectrophenax nivalis) est régulier en petit nombre lors de son passage postnuptial.

À la fin de l’automne et en hiver, des passages parfois importants

Pingouin torda (Alca tarda)

Pingouin torda (Alca tarda) devant la pointe de Bloscon (Finistère) (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Laurent Thébault

À la fin de l’automne, les tempêtes peuvent parfois pousser plusieurs milliers d’oiseaux (plus de mille par heure), notamment des Mouettes tridactyles (Rissa tridactyla) (jusqu’à 1 020 le 4 novembre 2022), des Fous de Bassan (jusqu’à 1 467 le 3 octobre 2008), des Pingouins tordas (jusqu’à 1 568 le 11 novembre 2007), des Guillemots de Troïl (jusqu’à 369 le 4 novembre 2017) et des Grands Labbes (Stercorarius skua).
Le passage de la dépression Ciaran en novembre 2023 a permis de voir des Phalaropes à bec large (Phalaropus fulicarius) (jusqu’à 18 le 3 novembre 2023) et des Océanites culblanc (Oceanodroma leucorhoa) qui avaient été poussés dans la Manche. Le 30 novembre 2009, jusqu’à 126 Océanites culblanc, bloqués dans la baie de Morlaix par un puissant vent de Nord-ouest, avaient été observés (lire Les Océanites culblanc peuvent-ils survivre lorsqu’ils sont entraînés loin à l’intérieur des terres ?).
De janvier à mars inclus, la variété des espèces est plus faible, mais on peut alors observer des mouvements d’hivernants « régionaux », comme la Bernache cravant (Branta bernicla), le Harle huppé ou le Plongeon imbrin (Gavia immer).
Le Puffin des Baléares peut aussi être noté durant la mauvaise saison, des cas d’hivernage en Bretagne étant connus par exemple dans les baies de Saint Brieuc, de Lannion et de Douarnenez (lire La baie de Douarnenez, la baie des canards marins).
Des « raretés » ont été notées depuis la pointe de Bloscon, comme les Goélands à ailes blanches (Larus glaucoides) (un le 29 janvier 2010) et bourgmestre (L. hyperboreus) (un le 10 novembre 2006) ou le Mergule nain (Alle alle) (un le 11 novembre 2007).

Au printemps : des passages de puffins

Les Puffins des Anglais peuvent se montrer très nombreux à la fin du mois d’avril, avec des radeaux comptant parfois plusieurs centaines d’oiseaux (jusqu’à 1 000 individus le 26 avril 2024). Au mois de mai, les Sternes pierregarins, caugek et parfois de Dougall (les dernières en 2013) sont visibles.
L’Océanite tempête est régulier en juin (jusqu’à 43 le 26 juin 2007), tout comme le Fulmar boréal (Fulmarus glacialis) (16 le 27 mai 2007).

Un site intéressant  pour l’observation des mammifères marins

Dauphins communs à bec court (Delphinus delphis)

Dauphins communs à bec court (Delphinus delphis) devant la pointe de Bloscon (Finistère) (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Laurent Thébault

La pointe de Bloscon est par ailleurs un site où l’on peut facilement observer des Phoques gris (Halichoerus grypus) et des Dauphins communs à bec court (Delphinus delphis) (jusqu’à 25 le 8 septembre 2021), et plus rarement des Marsouins communs (Phocoena phocoena) (jusqu’à cinq le 10 mars 2015) et des Dauphins de Risso (Grampus griseus) (jusqu’à sept le 17 mai 2008).

D’autres bons sites pour observer les oiseaux autour de la pointe de Bloscon

L’île de Batz, qui est visible depuis la pointe de Bloscon, accueille des colonies de Goélands argentés (Larus argentatus) et bruns (L. fuscus), ainsi que quelques passereaux nicheurs comme le Pipit farlouse (Anthus pratensis), même si la forte fréquentation touristique limite ses capacités d’accueil. Elle est intéressante pour la recherche de passereaux migrateurs et le suivi des oiseaux pélagiques en automne.
À l’est, la baie de Morlaix, parsemée de nombreux îlots rocheux (dont plusieurs ont été classés en réserve ornithologique), accueille plusieurs nicheurs, dont le Cormoran huppé (Gulosus aristotelis), l’Huîtrier pie (Haematopus ostralegus), la Sterne pierregarin (Sterna hirundo), les Goélands argenté (Larus argentatus), brun (L. fuscus) et marin (L. marinus),  l’Aigrette garzette (Egretta garzetta), le Tadorne de Belon (Tadorna tadorna), le Pipit maritime (Anthus petrosus) et le Faucon pèlerin (Falco peregrinus), et c’est un site important pour le stationnement et l’hivernage des limicoles et de la Bernache cravant. 
Plus à l’est, la réserve naturelle nationale des Sept-Îles (Côtes-d’Armor) protège les plus grandes populations d’oiseaux marins nicheurs de France continentale (lire Un Fou brun visite la colonie de Fous de Bassan de la réserve des Sept-Îles en juillet 2023).
À l’ouest de la pointe de Bloscon, l’anse de Kernic, près de Plouescat, est intéressante en hiver pour ses rassemblements de limicoles, mais aussi pour l’observation des passereaux nordiques en hiver (lire Observer les oiseaux des dunes, vasières et prés salés de l’anse de Kernic).
Non loin de là, la baie de Goulven est également réputée pour ses stationnements de limicoles en automne et en hiver.
Le sémaphore de Brignogan, dans la commune de Plounéour-Brignogan-Plages, est enfin le meilleur site de suivi du passage des oiseaux pélagiques en automne. 

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