L’apport de nourriture (graines, graisses, eau sucrée, etc.) dans les jardins et sur les balcons a des effets variés sur l’avifaune :

  • lorsque les hivers sont rudes, il améliore le taux de survie d’oiseaux qui auraient autrement du mal à trouver de la nourriture.
  • Il peut contribuer à la progression vers le nord de l’aire de répartition de certaines espèces, comme la Tourterelle triste (Zenaida macroura) en Amérique du Nord, en les aidant à passer la mauvaise saison.
  • Il peut favoriser la sédentarisation de certaines espèces, qui n’ont plus besoin de migrer étant donné qu’elles trouvent désormais de quoi manger durant la mauvaise saison. C’est par exemple le cas de la Fauvette à tête noire (Sylvia atricapilla) en Europe, et de plusieurs carouges et bruants en Amérique du Nord (lire Divergences phénotypiques chez la Fauvette à tête noire liées aux activités humaines).
  • Il peut modifier le trajet migratoire d’oiseaux nordiques. Ainsi, le grande nombre de mangeoires installées dans les jardins du nord-est et du nord des États-Unis auraient créé une sorte de « ligne Maginot » incitant différents passereaux de la taïga, comme le Gros-bec errant (Hesperiphona vespertina), à ne pas aller plus au sud en hiver (lire L’irruption prévue de Gros-becs errants en Amérique du Nord durant l’automne 2022 a bien eu lieu).
  • Il favorise les concentrations locales, ce qui peut certes faciliter la transmission de maladies si certaines précautions ne sont pas prises (lire Nourrir les oiseaux : limiter les risques de salmonellose), mais aussi attirer des oiseaux rares arrivés accidentellement et cherchant à se nourrir.
  • Enfin, il facilite l’observation des oiseaux et donc la découverte éventuelle de raretés (lire Les mangeoires peuvent attirer des oiseaux très rares). On estime par exemple que la généralisation en Amérique du Nord des distributeurs d’eau sucrée dans les jardins (lire Attirer et nourrir les colibris et les souimangas dans son jardin) expliquerait en partie l’augmentation du nombre de données automnales de Colibris roux (Selasphorus rufus) à l’est du Mississippi, alors que cet oiseau y était autrefois très rarement vu. La création de plateformes collaboratives en ligne, comme eBird et les sites web du réseau Visionature, a contribué à diffuser les découvertes de ces raretés régionales, voire nationales.
Situation de Whitburn (Grande-Bretagne)

Situation de Whitburn (Grande-Bretagne).
Carte : Ornithomedia.com 

Le Passerin indigo (Passerina cyanea) mâle en plumage nuptial est bleu sombre avec les ailes et le dessus de la queue marqués de noir. La femelle a le dessus entièrement brun, avec les épaules, les grandes et les moyennes couvertures grisâtres, les rémiges sombres et ternes, les rectrices brun délavé et le ventre brun pâle. En dehors de la période de reproduction, le mâle ressemble à la femelle, tout comme le juvénile.

Il vit à la lisière et dans les clairières des bois et des forêts ou dans les zones broussailleuses, et séjourne en automne et en hiver dans les prairies, les friches, les cultures et les parcelles forestières en cours de régénération. Il se nourrit de graines, de bourgeons et d’invertébrés.

Le Passerin indigo niche du sud du Canada au sud des États-Unis et hiverne du centre du Mexique au Panama et aux Grandes Antilles. C’est une espèce accidentelle très rare en Europe, avec par exemple moins de dix données en Grande-Bretagne depuis 1964 (source : Historical Rare Birds), un oiseau en octobre 2012 et un en octobre 2010 sur l’île de Corvo aux Açores (lire Observer les oiseaux sur l’île de Corvo) et un individu au Danemark en juillet 2009 (source : Netfugl).

Passerin indigo (Passerina cyanea)

Passerin indigo (Passerina cyanea) mâle de premier été se nourrissant dans un jardin à Whitburn, en Écosse (Grande-Bretagne), le 19 mai 2024 (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : David Dack / Sa page X

Peter Bell, membre du Durham Wildlife Trust, a découvert le 18 mai 2024 un mâle de premier été non bagué se nourrissant de graines de tournesol dans son jardin situé à Whitburn, en Écosse (Grande-Bretagne). Il était encore présent le 20 mai au moins. Plus de cent observateurs sont venus dans sa maison pour le voir ! Ce passereau nord-américain, qui visite parfois les mangeoires en Amérique du Nord (voir la vidéo à la fin de cet article), a sûrement choisi ce jardin car des graines de Millet rouge et de Tournesol noir y sont distribuées durant une partie de l’année, attirant notamment des dizaines de Moineaux friquets (Passer montanus) en hiver.

Cet oiseau, dont l’origine sauvage est probable mais reste à déterminer, pourrait être arrivé en Écosse en automne, peut être aidé par les vents forts ayant accompagnés le passage d’une dépression sur l’océan Atlantique. Fait intéressant, le site web Birdguides a précisé qu’un Passerin indigo de premier été avait aussi été trouvé dans le sud-est de l’Islande le 19 mai, et un probable à Skagen (Danemark) le 9 mai.

Il existe d’autres cas de découverte d’oiseaux accidentels rares aux mangeoires : citons par exemple la découverte d’une Mésange de Pleske, un hybride rarissime entre une Mésange azurée (Cyanistes cyanus) et une Mésange bleue (C. caeruleus) dans un jardin de Grans (Bouches-du-Rhône) en décembre 2010 (lire Michel Carré et la visiteuse venue de l’Est) et un Bruant nain (Emberiza pusilla) dans ce même jardin en février 2017, ou une Calliope sibérienne (Calliope calliope) qui a stationné durant plusieurs jours dans un jardin à Hoogwoud (Pays-Bas) en janvier 2016 (lire Des ornithologues font la queue pour observer une Calliope sibérienne dans un jardin des Pays-Bas).

Passerin indigo (Passerina cyanea) visitant le Treman Bird Feeding Garden du Cornell Lab of Ornithology, dans l’État de New York (États-Unis), le 15 mai 2018.
Source : Cornell Lab Bird Cams

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