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Les zones urbaines d’Amérique du Nord pourraient-elles assurer l’avenir de la Pie-grièche migratrice ?

Pie-grièche migratrice (Lanius ludovicianus) en Amérique du Nord.
Photographie : Andrea Westmoreland/ Wikimedia Commons
La Pie-grièche migratrice (Lanius ludovicianus) est une espèce nord-américaine vivant du sud du Canada au Mexique : elle est répandue, mais certaines populations ou sous-espèces sont en déclin ou menacées (lire Faut-il élever et lâcher des Pies-grièches à poitrine rose en France ?).
![]() Situation du comté de Horry, en Caroline du Sud (États-Unis). |
Elle peut vivre dans différents habitats, à condition qu’ils soient suffisamment riches en nourriture, en perchoirs (arbustes, clôtures, etc.) et en zones de chasse dégagées. Elle capture une grande variété de proies, principalement des invertébrés, mais aussi des petits mammifères, des lézards, des amphibiens et des oiseaux (parulines, roselins, troglodytes, etc.), parfois d’une taille relativement grande, comme la Tourterelle triste (Zenaida macroura) (lire Des Pies-grièches migratrices tuent et mangent des Colins écaillés au Mexique).
La Pie-grièche migratrice est également parfois présente dans les zones urbaines nord-américaines : des populations vivent ainsi par exemple dans l’agglomération de Tucson en Arizona et dans le comté de Horry, en Caroline du Sud (États-Unis). Toutefois, les chats et les collisions avec les véhicules et les vitres constituent des menaces sérieuses dans les secteurs résidentiels.
Dans un article publié en 2024 dans le Journal of Field Ornithology, des biologistes ont présenté les résultats du suivi entre 2019 et 2022 d’individus bagués dans un secteur de 8,4 km² dans le comté de Horry, en Caroline du Sud, en notant la densité de la population, la taille du domaine vital durant et en dehors de la saison de reproduction, ainsi que l’espacement entre les nids (N = 142).
Durant la période d’étude, la zone a accueilli une densité moyenne de 6,9 oiseaux par km² (et de 2,9/km² dans une zone étendue de 19,8 km²). La superficie du domaine vital annuel était en moyenne de 2,5 hectares et ne variait pas en fonction de la saison. La distance médiane entre les nids actifs les plus proches était de 354 mètres.
La comparaison de ces résultats avec ceux obtenus lors d’autres études réalisées dans des secteurs ruraux montre que la zone urbaine étudiée accueille une densité nettement plus élevée de Pies-grièches migratrices, qui défendent des domaines vitaux plus petits et qui nichent plus près les uns des autres, suggérant que ce passereau peut prospérer près des villes, et même davantage encore que dans fes secteurs plus naturels, ce qui pourrait le conduire, au moins localement, à profiter de l’étalement urbain, qui est particulièrement visible en Amérique du Nord.
Toutefois, l’exemple du compté du Horry n’est pas forcément réplicable partout : le succès de sa population de Pies-grièches migratrices pourrait s’expliquer par sa richesse particulière en invertébrés, mais aussi par son climat doux, y compris en hiver, leur permettant de ne pas avoir à étendre leur domaine vital en dehors de la saison de nidification et de ne pas pas avoir besoin de vastes territoires. La densité d’oiseaux observée dans la zone d’étude était par exemple plus de 50 fois supérieure à celles mesurées en 2015 dans quatre comtés ruraux de Caroline du Nord et du Sud ! Lors de recherches menées dans le Colorado, la distance minimum séparant deux nids actifs (N= 77) était de 400 mètres, contre 43 dans le comté de Horry.
Bien que la Pie-grièche migratrice connaît un déclin global à l’échelle de son aire de répartition, ces résultats suggèrent que certaines zones urbaines pourraient leur offrir de nouveaux habitats riches en ressources. Ces oiseaux ont besoin de zones ouvertes avec de l’herbe courte et des étendues de sol nu, des perchoirs pour chasser et des arbres ou des arbustes ligneux pour nicher. Les banlieues américaines offrent de vastes surfaces de pelouses tondues séparées par des trottoirs et plantées de végétaux ligneux.
Certaines zones urbaines nord-américaines pourraient-elles donc assurer l’avenir de cette espèce ? D’autres études sur l’écologie des populations vivant près des villes, notamment sur le succès de leur reproduction et sur le taux de survie des adultes et des juvéniles, seraient nécessaires pour pouvoir répondre à cette question.
Pie-grièche migratrice (Lanius ludovicianus) dans un jardin en Amérique du Nord.
Source : Malatto1035
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Compléments
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- Shrikes: A Guide to the Shrikes of the World de Norbert Lefranc, Tim Worfolk (Illustrations)
Source
Katie A. Maddox et Christopher E. Hill (2024). Use of space by urban Loggerhead Shrikes (Lanius ludovicianus) as a window into habitat suitability. Journal of Field Ornithology. Volume : 95. Numéro : 2. digitalcommons.coastal.edu
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