Le Faucon sacre (Falco cherrug) est une grande espèce (envergure 105 – 129 cm) aux ailes assez larges. L’adulte typique a le dessus du corps, de la queue et des ailes brun terreux, vaguement nuancé de roux, et le dessous chamois blanchâtre, les flancs et le ventre fortement striés de sombre, et les « culottes » brunes. La tête est pâle avec d’étroites moustaches sombres. Les pattes et la cire (= la protubérance charnue au-dessus du bec) sont jaunâtres.

Faucon sacre (Falco cherrug) de seconde année

Faucon sacre (Falco cherrug) de seconde année près de Sainte-Foy-d’Aigrefeuille (Haute-Garonne) en janvier 2025 (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Thomas Dagonet

Comme chez la plupart des rapaces, la femelle est plus grande que le mâle (lire Pourquoi les femelles de rapaces sont-elles généralement plus grandes que les mâles ?). Le juvénile ressemble à l’adulte, mais son ventre et ses flancs sont plus fortement striés de sombre, ses sourcils pâles sont davantage visibles car sa calotte est généralement plus sombre, et ses moustaches sont plus sombres et plus épaisses. Les pattes et la cire sont grisâtres. À tous les âges, le dessous des ailes présente un contraste entre les couvertures sombres et les rémiges secondaires et tertiaires grisâtres.

Il vit dans les forêts claires, les steppes arborées, les cultures et les semi-désert rocheux et hiverne dans des milieux ouverts variés. Il se reproduit sur des falaises, des arbres, des structures d’origine humaine (sur des pylônes par exemple) ou même parfois au sol.

Son aire de répartition s’étend de l’Europe centrale à la Chine en passant par l’Asie centrale, l’Iran et la Turquie. Une partie des oiseaux hiverne en Afrique de l’Est et centrale, au Moyen-Orient et dans le sous-continent indien. Quatre sous-espèces sont reconnues.

Sa population mondiale est estimée entre 6 100 et 14 900 couples, dont entre 640 et 720 couples en Europe. Il s’agit d’une espèce rare et menacée à cause des collisions avec les lignes électriques, des collectes illégales d’œufs et d’oisillons pour la fauconnerie (des milliers de juvéniles seraient encore capturés chaque année pour les fauconniers du Moyen-Orient), des tirs volontaires ou involontaires, des transformations de son habitat (mise en culture, plantations d’arbres, abandon du pastoralisme, etc.) et de l’empoisonnement de ses proies (rongeurs) par les agriculteurs. Le déclin serait particulièrement prononcé dans les steppes d’Asie centrale.

C’est une espèce rare et accidentelle en Europe de l’Ouest, et l’origine sauvage des oiseaux observés n’est pas toujours confirmée du fait de l’utilisation de l’espèce en fauconnerie (lire Le Faucon sacre observé dans le département du Rhône en mars 2022 a-t-il une origine sauvage ?).

Situation de Sainte-Foy-d'Aigrefeuille (Haute-Garonne)
Situation de Sainte-Foy-d’Aigrefeuille (Haute-Garonne), où un Faucon sacre (Falco cherrug) a été découvert en janvier 2025. 
Carte : Ornithomedia.com

Un individu immature (de seconde année) a été découvert le 23 janvier 2025 dans le secteur de Sainte-Foy-d’Aigrefeuille (Haute-Garonne), où il était encore présent le 3 février au moins (voir une sélection d’observations récentes en France) : presque quotidiennement, il est vu chassant des Pigeons bisets (Columbia livia) semi-domestiques dans les champs environnants, qu’il mange ensuite sur l’un des pylônes d’une ligne à haute tension. 

Durant la période de nidification, le Faucon sacre chasse principalement des rongeurs (notamment du genre Spermophilus en Asie centrale et en Europe orientale) et des oiseaux, et en hiver, il se nourrit surtout d’insectes (orthoptères et coléoptères) et d’oiseaux. Plusieurs études menées dans différents pays ont confirmé la place essentielle  occupée par les Pigeons bisets, comme c’est également le cas pour le Faucon pèlerin (F. peregrinus).

Au cours des hivers 2012-2013 et 2013-2014, des ornithologues ont analysé 40 pelotes de réjection de deux individus hivernant en Sicile (Italie), identifiant 124 proies appartenant à 29 espèces. Les insectes étaient dominants, avec près de 67 % des restes trouvés, mais les Pigeons bisets, abondants sur l’île, représentaient près de 46 % de la biomasse ingérée.   

En Slovaquie, 2 991 proies ont été collectées entre 2011 et 2013 dans 42 aires (lire Trois bons secteurs pour observer les oiseaux dans les plaines slovaques) et le Pigeon biset était aussi la proie prédominante, représentant en moyenne 58 % du total. 

Faucon sacre (Falco cherrug) de seconde année

Faucon sacre (Falco cherrug) de seconde année mangeant un Pigeon biset (Columba livia)  sur un pylône près de Sainte-Foy-d’Aigrefeuille (Haute-Garonne) en janvier 2025 (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Thomas Bareyre

En Tchéquie, la surveillance de 44 couples entre 2011 et 2018 a permis de constater que les Pigeons bisets représentaient près de 60 % des 141 proies trouvées. En dehors de la période de production, les Faucons sacres sont également attirés par les grandes troupes de Pigeons colombins (Columba oenas) et bisets semi-domestiques se nourrissant dans les champs, mais aussi par les Hamsters européens (Cricetus cricetus). 

Dans ses zones de nidification européennes, l’intensification de l’agriculture et  la diminution des surfaces des steppes expliqueraient pourquoi le Faucon sacre se tourne vers le Pigeon biset au détriment du spermophile, devenu rare. La surveillance entre 1976 et 2016 de 88 couples dans l’ouest et l’est de la Slovaquie a confirmé ce changement de régime, les mammifères occupant une part de plus en plus réduite, tandis que la proportion occupée par les oiseaux a beaucoup progressé : dans l’ouest du pays, les pigeons semi-domestiques représenteraient ainsi désormais de 52 à 62 % des proies. Dans l’est, cette proportion est plus faible (32 %), le Campagnol des champs (Microtus arvalis), l’Étourneau sansonnet (Sturnus vulgaris), la Pie bavarde (Pica pica) et la Corneille mantelée (Corvus cornix) étant davantage chassés. 

Dans les pays où le nombre de spermophiles reste important, comme en Asie centrale, leur proportion dans le régime alimentaire du Faucon sacre est encore conséquente : par exemple, dans le centre du Kazakhstan, le Spermophile à joues rouges (Spermophilus erythrogenys) et la Grande Gerbille (Rhombomys opimus) représentent près de 50 % des proies consommées. Dans le centre et l’est de la Turquie, l’analyse de 40 pelotes en 2007 a montré que 77 % des espèces chassées étaient des Spermophiles d’Anatolie (Spermophilus xanthoprymnus).

Cette  adaptation de l’alimentation, combinée avec la protection dont il bénéficie et la pose de plateformes de nidification sur les pylônes, expliquerait la croissance, ou en tout cas le maintien de sa population, dans certains pays d’Europe au cours des dernières décennies. Toutefois cette progression est fragile, comme on l’a constaté dans le nord de la Hongrie, où un déclin significatif a été observé au cours de la dernière décennie : le nombre de couples y est passé de 72 en 2009 à 45 en 2019, et le succès de la reproduction a baissé de 2,6 jeunes par couple à deux. L’une des principales causes de cette tendance négative serait justement la réduction du nombre de Pigeons bisets, qui nichaient traditionnellement dans les vieux bâtiments qui sont souvent détruits ou rénovés (lire Le nombre de couples de Faucons sacres a bien progressé en Hongrie depuis 1980, mais il fluctue depuis quelques années).

Une réaction négative des éleveurs de pigeons (colombophiles) est également à craindre dans certains pays. 

Faucon sacre (Falco cherrug) près de Sainte-Foy-d’Aigrefeuille (Haute-Garonne) en février 2025.
Source : Thibaud Daumal

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