Le Geai des chênes (Garrulus glandarius), et les rongeurs comme le Mulot sylvestre (Apodemus sylvaticus) et l’Écureuil roux (Sciurus vulgaris), jouent un rôle essentiel dans la dispersion des Chênes pédonculés (Quercus robur) et des Noisetiers (Corylus avellana) en Europe (lire Le Geai des chênes ne raffole pas des glands du Chêne rouge d’Amérique). Dès la fin de l’été et durant l’automne, il collecte puis cache de nombreux fruits, parfois dans un rayon de plusieurs kilomètres, puis il les consomme durant l’hiver (lire Les geais sont des planificateurs avisés). Un seul oiseau peut enterrer plusieurs milliers de glands (entre 2 200 et 5 700 selon Chettleburgh 1952 et Kollmann & Schill 1996) chaque année, et l’espèce joue ainsi un rôle crucial dans la propagation des chênes.

Il recherche les glands dès la fin de l’été dans le feuillage des chênes, puis au sol plus tard dans la saison. Il les transporte ensuite (jusqu’à six en même temps) sur une distance plus ou moins importante pour les cacher dans un sol meuble, puis il recouvre l’endroit de matériaux (feuilles, terre, cailloux, mousse, etc.). Il choisit parfois des cavités d’arbres pour les stocker, ce qui lui permet que ses réserves ne soient pas mangées par le Sanglier d’Europe (Sus scrofa) et/ou par de petits rongeurs, comme les campagnols (Microtus sp.) et le Mulot sylvestre (Apodemus sylvaticus). Elles sont en outre toujours tout le temps accessibles, même après d’importantes chutes de neige. Ce comportement est probablement plus répandu dans les forêts riches en vieux arbres.  

L'un des glands avait été caché dans ce bâtiment en ruine

L’un des glands avait été caché dans ce bâtiment en ruine situé dans le sud de la Pologne.
Photographie : Aleksandra Wróbel et al / Journal of Ornithology

Dans un article publié en 2024 dans le Journal of Ornithology, des ornithologues ont présenté des cachettes plus surprenantes. En octobre et en novembre 2023, ils ont mené des recherches sur la dispersion du Chêne pédonculé (Quercus robur) par les geais dans des parcelles agricoles abandonnées dans le sud de la Pologne. Ils ont proposé aux Geais des chênes des glands dans lesquels des émetteurs radio avaient été placés afin de pouvoir trouver rapidement la localisation des cachettes.

Les auteurs ont retrouvé 253 des 259 glands initialement marqués, dont 222 avaient été cachés. La plupart d’entre eux avaient été dissimulés dans la litière, dans la végétation courte ou enterrés, mais pour six d’entre eux, la cachette était plus originale, par exemple dans des tiges de Renouée du Japon (Reynoutria japonica), dans un tronc pourri de Saule marsault (Salix caprea) ou dans des ruines.
 
Les Geais des chênes adoptent des stratégies sophistiquées pour éviter que leurs réserves ne soient pillées par d’autres oiseaux, en particulier par leurs congénères (lire Le geai utilise aussi des indices sonores pour piller les réserves des autres) et par les rongeurs, ce qui les conduit parfois à choisir des emplacements en hauteur qui ne favorisent pas la germination des graines et donc le renouvellement forestier. L’absence de cachettes favorables, par exemple dans des monocultures de conifères, pousserait parfois ces oiseaux à chercher des lieux de stockage inattendus, comme des bâtiments abandonnés. Des expériences antérieures ont montré que ce type de choix pourrait être plus fréquent qu’on ne croyait.  

Geai des chênes (Garrulus glandarius) enterrant un gland 
Source : Ralph Hancock

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