L’Aigle des steppes (Aquila nipalensis) est un grand rapace (envergure : 165 – 190 cm) robuste, aux longues et larges ailes rectangulaires dont les extrémités sont profondément digitées, aux « culottes » (= les plumes couvrant les tibias) fournies, et au bec est fort avec des narines et des commissures jaunes bien visibles. Le plumage adulte, atteint après quatre mues annuelles, est brun foncé, tandis que le juvénile et l’immature sont plus clairs et présentent des bandes claires sous les ailes (lire Deux jeunes Aigles des steppes visitent la Belgique et les Pays-Bas en mai 2020).

L’Aigle des steppes se reproduit du sud de la Russie à la Mongolie et hiverne en Afrique orientale et australe, dans la péninsule arabique, le sous-continent indien et en Asie du Sud-est. Près de 80 % de la population mondiale nichent au Kazakhstan et en Ouzbékistan, et presque tous ces oiseaux survolent Israël puis l’Azerbaïdjan (lire Besh Barmag : un très important site pour la migration des oiseaux d’Eurasie) lors de leur migration de printemps.

Deux sous-espèces sont reconnues :

C’est une espèce accidentelle très rare en Europe de l’Ouest (lire Un Aigle des steppes découvert en Normandie en mai 2022 : une donnée remarquable qui en rappelle deux autres).

Aire de répartition de l'Aigle des steppes (Aquila nipalensis)

Aire de répartition de l’Aigle des steppes (Aquila nipalensis) et situation de l’Anatolie centrale (Turquie) (en rouge, la zone de nidification au printemps, en jaune, les zones survolées durant les migrations et en bleu, la zone d’hivernage).
Carte : Ornithomedia.com

L’Aigle des steppes niche dans des milieux arides (steppes, semi-déserts et forêts claires sèches), en plaine ou en montagne, au sol, sur des rochers, dans des buissons ou des arbres. La sous-espèce nominale se reproduit plutôt dans les zones montagneuses, jusqu’à 2 000 mètres d’altitude, alors que la sous-espèce A. n. orientalis se reproduit plutôt dans les plaines. Il hiverne dans des habitats variés (savanes, cultures, steppes, etc.).

C’est un rapace menacé à l’échelle mondiale, dont les populations sont en déclin dans presque toutes les parties de son aire de répartition. Au cours du XXe siècle, il a ainsi disparu de Roumanie, d’Ukraine et de l’ouest de la Russie, et la limite ouest de son aire de reproduction s’est rétractée d’environ 1 000 km vers l’Est. En 2015, l’espèce a été déclarée comme étant globalement en danger par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature.

La Turquie est située à l’extrémité sud-ouest de son aire de reproduction. Dans ce pays, son statut est incertain : en effet, historiquement, seuls deux sites de nidification étaient connus dans le secteur du lac (Gölü) Tuz, en Anatolie centrale, mais ils n’ont été occupés que durant certaines années entre 1969 et 1980. Par ailleurs, d’autres données se rapportaient en fait à l’Aigle impérial (Aquila heliaca), bien que cette espèce ne construise jamais (ou très rarement) de nid au sol ou sur de petits buissons.

Aucun cas de reproduction n’a été trouvé au XXe siècle, bien que des adultes aient été observés à quelques reprises en Anatolie centrale et orientale pendant la saison de reproduction entre 1998 et 2003. Cette dernière année, une aire active contenant des poussins a finalement été trouvée près du lac anatolien de Seyfe.

Lors d’une expédition conjointe russo-hongroise organisée entre le 22 et le 26 avril 2015 en Anatolie, huit territoires occupés ou potentiels ont été découverts dans les provinces de Kırşehir et de Konya : quatre accueillaient des nids actifs et quatre seulement des adultes. La nidification de l’espèce dans la province d’Aksaray a également été suspectée suite à la découverte d’un nid vide.

Sur la base de ces résultats encourageants, d’autres recherches ont été menées entre 2017 et 2022 : au total, 38 aires ont été découvertes, dont 15 étaient actives (adultes incubant des œufs ou élevant des jeunes). Les couvées contrôlées contenaient en moyenne deux œufs (n=6), 1,65 oisillon (n=18) et 1,37 jeune (n=16). Par ailleurs, un couple mixte composé d’un mâle d’Aigle des steppes et d’une femelle d’Aigle impérial a élevé avec succès des jeunes durant plusieurs saisons. La dispersion et la migration de six jeunes Aigles des steppes et de deux hybrides ont été suivies à l’aide d’émetteurs GPS qui ont montré qu’ils hivernaient au Sahel (Afrique).

Ces recherches ont également confirmé l’existence de sérieuses menaces pesant sur la petite population turque d’Aigles des steppes, notamment les électrocutions, les tirs illégaux, la modification de leur habitat et le développement des infrastructures. Des études plus approfondies seraient nécessaires pour assurer le maintien de ce rapace en Anatolie.

Vidéo d’une aire contenant deux jeunes Aigles des steppes (Aquila nipalensis) dans la région d’Orenbourg (Russie) en août 2021.
Source : Pavvlovich

Réagir à notre article

Réagissez à cet article en publiant un commentaire