Qu’appelle-t-on un ver de farine ?

Vers de farine élevés dans du son

Vers de farine élevés dans du son.
Photographie : Rasbak / Wikimedia Commons

Les vers de farine ne sont pas des vers à proprement parlé comme les lombrics : ce sont en fait des larves de plusieurs espèces de coléoptères de la famille des Ténébrionidés qui se développent dans les céréales et dans les matières organiques riches en amidon. Si on laissait finir le processus, elles deviendraient des insectes adultes après être passées par le stade de pupe.
Les larves du Ténébrion meunier (Tenebrio molitor), qui sont produites en grand nombre pour les marchés des appâts et de l’alimentation animale et humaine sont les plus connues : elles sont en effet faciles à élever en captivité dans de bonnes conditions d’hygiène et à des coûts réduits grâce à leur court cycle de reproduction. Elles sont généralement assez résistantes, mais elles sont sensibles à la chaleur et au froid extrêmes, et peuvent également être tuées par les pesticides.
Les vers de farine sont vendus vivants ou déshydratés.

Les qualités nutritionnelles des vers de farine

Les vers de farine constituent une source précieuse de protéines et de calories, mais aussi de fibres et de graisses « saines ». Quand ils sont vivants, ils contiennent 62 % d’eau, 13 % de lipides, 20 % de protéines, 1,5 % de cendres et 3,1 % de glucides. Quand ils sont déshydratés, ils sont composés de 5 % d’eau, de 28 % de lipides, de 53 % de protéines, de 4,1 % de cendres et de 8,5 % de glucides. 
Leurs protéines contiennent tous les acides aminés essentiels nécessaires à la croissance et à la réparation des tissus, et elles aident à renforcer le système immunitaire et à favoriser une croissance saine des oiseaux.
Leurs matières grasses, composées principalement de graisses polyinsaturées et monoinsaturées, jouent un rôle important dans le développement cellulaire et dans la production d’énergie, notamment pour des animaux actifs comme les oiseaux.
Les vers de farine sont également riches en vitamines, notamment B (B1, B2, B5, B7, B12), et en minéraux essentiels (fer, zinc, potassium et magnésium), qui sont vitaux pour la santé générale des oiseaux (succès de reproduction plus élevé, peau et plumes plus saines et résistance accrue aux maladies). 
Les vers contiennent enfin une quantité importante de fibres, surtout sous forme de chitine, qui aide à améliorer la digestion.

Attention à l’origine des vers de farine

Les vers de farine sont élevés en très grandes quantités : certaines fermes d’insectes asiatiques peuvent en livrer plus de 50 tonnes vivants et plusieurs centaines de tonnes déshydratés par mois. Ils ne sont pas toujours élevés avec des aliments de qualité, et du polystyrène est même parfois utilisé ! Ils sont alors très pauvres en nutriments et doivent être enrobés d’une poudre nutritionnelle avant d’être vendus. Même s’ils ne sont pas dangereux pour les oiseaux, préférez donc si possible une origine européenne. Choisissez d’une manière générale des fournisseurs reconnus et vérifiez l’absence de moisissures ou d’odeurs suspectes à l’ouverture des sachets.

Quels oiseaux sont susceptibles de manger des vers de farine dans les jardins ?

Rougegorge familier (Erithacus rubecula)

Rougegorge familier (Erithacus rubecula) avec un ver de farine dans le bec.
Photographie : Philip Heron / Wikimedia Commons

En dehors de la période de nidification, beaucoup d’oiseaux visitant les jardins se nourrissent de graines, comme les moineaux (Passer sp.), les pinsons (Fringilla sp.), le Verdier d’Europe (Chloris chloris) ou les Mésanges charbonnière (Parus major) et bleue (Cyanistes caeruleus) (lire Quelles graines à donner pour quelles espèces d’oiseaux ?) et d’autres de fruits mûrs, comme le Merle noir (Turdus merula) ou la Grive musicienne (T. philomelos). En dehors des passereaux qui sont strictement granivores en hiver, comme les fringilles (pinsons, verdiers, gros-becs, bouvreuils, etc.), la plupart sont également susceptibles de manger les autres aliments mis à leur disposition, comme les graisses (lire Boules de graisse pour oiseaux des jardins : retirez les filets) et les vers de farine.
Ces derniers attireront bien entendu les oiseaux essentiellement insectivores, comme le Rougegorge familier (Erithacus rubecula) et l’Accenteur mouchet (Prunella modularis), mais aussi ceux qui mangent beaucoup d’invertébrés au printemps et en été, comme les mésanges, les merles, les grives ou l’Étourneau sansonnet (Sturnus vulgaris), car tous ont aussi besoin de protéines. En dehors des espèces strictement frugivores ou granivores, le régime alimentaire dépend en effet de la période de l’année, de l’habitat et de la région. Par ailleurs, même les passereaux qui mangent essentiellement des graines donnent des invertébrés à leurs oisillons durant la période de nidification. 
La liste des oiseaux susceptibles de manger des vers de farine est donc très longue : moineaux, mésanges, rougegorges, accenteurs, rougequeue (Phoenicurus sp.), étourneaux, grives, merles, fauvettes (Sylvia sp. et Curruca sp.) roitelets (Regulus sp.), sittelles (Sitta sp.), merlebleus (Sialia sp.) (en Amérique du Nord), Corvidés (geais, pies, corneilles, etc.), etc.

Donner des vers de farine vivants ou déshydratés ?

Les vers de farine sont vendus vivants ou déshydratés (sous forme entière ou de farine). Ces derniers ont beaucoup d’avantages : ils sont moins « effrayants » car ils ne bougent pas, ils sont plus économiques et ils se conservent plus facilement et plus longtemps par temps chaud et froid. Ils sont par contre légèrement moins riches en nutriments à cause du traitement de séchage qu’ils ont subi.

Vers de farine vivants

Vers de farine vivants se nourrissant sur un morceau de pomme de terre (?).
Photographie : MarioM / Wikimedia Commons

Les vers de farine séchés ne sont pas dangereux pour le système digestif des oiseaux, même quand ils sont jeunes : ils ne risquent donc pas de former une « pâte compacte » et de créer une occlusion. Les contractions de la paroi musculaire solide du gésier sont en effet très efficaces en cas de besoin et une pelote (boulette) sera formée qui sera envoyée dans le proventricule puis expulsée.
Certaines sources ont évoqué le risque que les vers de farine puissent contenir des œufs de ténias (des vers parasitaires), mais il est très faible et les cas d’oiseaux parasités n’ont été trouvés que dans des élevages de volailles. Si vous avez un doute, préférez les vers de farine déshydratés car le séchage tue la plupart des parasites et des agents pathogènes.  

Faut-il réhydrater les vers de farine séchés avant de les donner aux oiseaux ?

Plusieurs sites web conseillent de plonger les vers de farine déshydratés dans l’eau tiède pendant un temps plus au moins long (jusqu’à trente minutes) avant de les distribuer. Ce point de vue est discutable, car les oiseaux mangent volontiers des aliments secs, comme les graines, et ils boivent par ailleurs si nécessaire : c’est d’ailleurs pour cette raison qu’il est important de mettre un point d’eau à leur disposition toute l’année (lire Conseils pour fournir de l’eau aux oiseaux dans les parcs et les jardins). Il n’y a donc aucune raison de croire que les vers de farine séchés ne seront pas avalés puis digérés facilement. Pendant la saison de nidification, hydrater les vers séchés peut toutefois être intéressant car les oisillons ne boivent pas d’eau et dépendent de l’humidité qu’ils obtiennent de leur nourriture.
Au printemps et en été, quand des invertébrés vivants sont disponibles, les vers de farine déshydratés peuvent être un peu moins attractifs pour les oiseaux : pour attirer leur attention, il est possible de distribuer d’abord des vers vivants pendant une courte période, ou bien de mélanger les deux. Des utilisateurs ont également constaté que placer des vers de farine vivants dans une soucoupe remplie de flocons d’avoine stimulait les oiseaux, car ils doivent alors faire  un effort pour les trouver.

Comment les conserver ?

Vers de farine déshydratés placés dans un bocal hermétique

Vers de farine déshydratés placés dans un bocal hermétique.
Photographie : Rasbak / Wikimedia Commons

Les vers de farine vivants peuvent se conserver environ une à deux semaines au réfrigérateur autour de 5 °C, une température qui provoquera leur dormance. Avant de les réfrigérer, vous pouvez les faire grossir un peu en les nourrissant avec de petites tranches de pomme de terre, des morceaux de carottes fraîches, de petits morceaux d’écorce d’orange et/ou des flocons d’avoine.
Ils peuvent aussi peuvent être conservés vivants entre 8 et 10 °C dans un endroit frais et sombre (pour provoquer la dormance et retarder la mue), comme un garage, une cave ou une buanderie, car ils sont propres et sans odeur. S’ils sont stockés correctement, ils peuvent vivre plusieurs semaines. 
Une fois que vous avez acheté un lot vivant, placez-le dans un récipient en plastique peu profond, d’une capacité suffisante (au moins de la taille d’une boîte à chaussures). Couvrez-le avec un tamis ou un couvercle perforé pour la circulation de l’air, en laissant assez d’espace entre les vers et le couvercle pour éviter qu’ils ne s’échappent. La meilleure litière est le son de blé. Donnez-leur des aliments au moins un à deux jours avant de les distribuer afin qu’ils conservent tout leur intérêt nutritif. Ne distribuez pas plus de nourriture qu’ils ne pourront manger pour éviter la moisissure, qui serait fatale.
S’ils sont déshydratés, ils pourront être gardés au moins un an dans un sac fermé (sans circulation d’air) et bien sec. 

Quand donner des vers de farine ?

Merlebleu de l'Est (Sialia sialis)

Merlebleu de l’Est (Sialia sialis) attrapant un ver de farine vivant dans une mangeoire en Géorgie (États-Unis) en décembre 2021.
Photographie (extraite d’une vidéo) : Gettysburg LiveCam

On peut fournir des vers de farine en hiver en complément d’autres aliments pour attirer ou fidéliser un plus grand nombre d’espèces, mais aussi au printemps et en été, si vous voulez aider les parents à nourrir leurs petits dans les secteurs où les insectes sont moins nombreux, comme en ville et là où est pratiquée l’agriculture intensive, même s’il est généralement conseillé de limiter le nourrissage aux périodes les plus froides de l’année (lire Quand faut-il arrêter de nourrir les oiseaux : en mars ou en avril ?).
Il n’y a pas de risque à distribuer trop de vers de farine pendant la période de nidification (à part celui de les gaspiller), car les adultes ne prendront que ceux qui seront nécessaires à l’élevage de leur progéniture. En Amérique du Nord, on a compté qu’un couple de Troglodytes familiers (Troglodytes aedon) faisait plus de 500 trajets par jour vers son nid, il est donc peu probable de réussir à les « saturer ».
Leur mettre à disposition des vers de farine ne les incitera pas non plus à avoir plus de couvées car la reproduction dépend de nombreux facteurs et pas seulement de la quantité de nourriture disponible. 
Fournir des vers de farine pendant la période de nidification peut être efficace : le client d’un vendeur britannique d’aliments a ainsi réussi à tripler en quatre ans la population de Moineaux domestiques d’un village du Northamptonshire en disposant dans une cage suspendue des vers de farine vivants. 
La mue, le processus par lequel les oiseaux perdent leurs anciennes plumes et en font pousser de nouvelles, constitue également une période critique  pour les oiseaux (lire Comprendre la mue chez les oiseaux). Chez les passereaux, elles se déroule généralement à la fin de l’été. après la saison de reproduction, et dure environ un mois. Les plumes représentant de 4 à 12 % de leur poids, une grande quantité de protéines est nécessaire pour les remplacer. En outre, les oiseaux deviennent alors plus vulnérables aux prédateurs car leur capacité de vol est souvent entravée : il peut donc être bénéfique de mettre à leur disposition des vers de farine riches en protéines, vivants de préférence. 
Enfin, durant les épisodes de sécheresse, les oiseaux qui se nourrissent au sol, comme les merles, sont souvent incapables de trouver suffisamment de vers de terre dans un sol devenu dur : leur donner des vers de farine (vivants de préférence) peut les aider. 

Des vers de farine de petite taille pour les oisillons

Mangeoire pour vers de farine

Une mangeoire suspendue abritée des intempéries et aux rebords suffisamment relevés est conseillée pour distribuer des vers de farine vivants.
Source : Livingwithbirds.com 

Si vous voulez distribuer des vers de farine au printemps pour aider les parents à nourrir leurs oisillons, ou pour aider les petits passereaux comme la Mésange bleue, il existe dans le commerce des « mini » vers de farine mesurant de de 13 à 18 mm de long, contre 20 à 32 mm pour ceux de dimension classique.  

Comment distribuer les vers de farine ?

Pour distribuer les vers de farine dans un jardin, on peut les disposer sur le sol, mais il est plus efficace de les placer sur une table, une mangeoire-plateau ou dans une soucoupe, légèrement en hauteur si possible pour éviter les attaques de prédateurs (lire Comment nourrir les oiseaux en hiver ?). S’ils sont vivants, des rebords ou des parois seront nécessaires pour les contenir, mais attention, par temps de pluie, ils risquent d’être noyés, sauf si un toit les protège des intempéries.
On peut les distribuer seuls ou mélangés aux graines (quand ils sont déshydratés).   
Commencez par donner de petites quantités, pour vérifier que les vers sont appréciés et pour éviter le gaspillage. La quantité consommée dépendra de chaque espèce d’oiseau : cinq à dix vers par jour pour les petites, et jusqu’à 30 pour celles de grande taille. On peut estimer qu’à terme, une centaine de vers de farine sera consommée par jour en moyenne dans un jardin de banlieue quand les oiseaux les auront repérés.
Il faut surtout adapter le rapport entre nombre de vers de farine distribués quotidiennement et nombre consommés. Si vous les donnez vivants en quantité adaptée, ils seront mangés avant de se transformer en pupes ou en coléoptères.
Pour éviter la concurrence entre les espèces, choisissez deux types de mangeoires : une suspendue et placée dans une cage pour les petites espèces, et une plus facile d’accès pour les autres, comme les étourneaux et les merles.

Une vidéo d’oiseaux mangeant des vers de farine placés dans une mangeoire

Une Mésange charbonnière (Parus major) et un Merle noir (Turdus merula) mangeant des vers de farine vivants placés dans une mangeoire en mars 2023.
Source : Vine House Farm

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